Plan interfédéral contre le racisme
En 2020, les gouvernements des différentes entités fédérées belges s’étaient accordés sur une méthodologie pour élaborer, enfin, le plan d’action auquel la Belgique s’était engagée en 2001, déjà. Les premiers mois, ponctués de nombreux groupes de travail (emploi, logement, soutien aux victimes, enseignement…), étaient prometteurs. Les textes finaux de ces échanges entre la société civile et les administrations formaient une base améliorable, certes, mais tout de même solide. Il ne restait plus qu’aux politiques à s’accorder sur le contenu définitif du plan.
La suite fut nettement plus complexe, de telle sorte qu’à l’heure actuelle, le plan n’a toujours pas été lancé.
Analyse globale des contributions des entités fédérées au plan interfédéral
Entre-temps, la plupart des entités fédérées ont annoncé leur contribution au plan interfédéral (ci-après, “contribution”). Ne manquent plus que la Communauté germanophone et la Flandre. Ces différentes contributions sont à géométrie fort variable, tant en termes de méthodologie, de degré de concrétisation que d’ambition.
Une réalisation des mesures au-delà de 2024
Toutes les contributions expriment l’ambition d’être mises en œuvre durant la législature en cours et la suivante. Compte tenu des changements potentiels au sein des coalitions gouvernementales, nous voyons trois pistes à même de s’assurer de l’exécution des mesures:
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- Prévoir des décrets/lois/ordonnances fixant l’exécution de certaines mesures
- Lancer les mesures d’ici la fin de la législature
- Reprendre dans les programmes de partis que l’exécution du plan interfédéral ( ou des contributions à ce plan) est une priorité, en particulier lors des négociations des futurs accords de gouvernements.
Peu d’attention pour la méthodologie
Au niveau de la méthodologie, le plan de la Région bruxelloise va le plus loin, en précisant le budget pour bon nombre de mesures, ainsi que le timing de réalisation, les indicateurs de réussite, les responsables de l’exécution et les partenaires à impliquer. Ces éléments permettront de suivre de près la réalisation du plan et d’évaluer les actions.
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Le gouvernement fédéral, la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Région Wallonne restent en défaut à cet égard – seul.e.s les ministres compétent.e.s sont indiqué.e.s. Ils pourraient
rectifier le tir lors de l’opérationnalisation des mesures.

Une avancée potentielle : plusieurs « conseils de lutte contre le racisme »
Les contributions des entités fédérées prévoient la création de « conseils de lutte contre le racisme », appelés à émettre des avis sur toute matière liée au racisme. Nous saluons cette initiative, tout en émettant des réserves.
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La Coalition NAPAR suit la mise en place de ces conseils de près. En effet, ils ont le potentiel de contribuer à des actions de lutte contre le racisme plus ambitieuses et efficaces.
La composition, le mode de fonctionnement, le mandat et la prise en compte des avis seront déterminants.
En parallèle de ces conseils consultatifs, nous demandons la création d’un comité de suivi global, veillant à la réalisation et à l’amélioration du plan interfédéral / des contributions existantes dans leur ensemble. Ce comité de suivi global a l’avantage de favoriser l’échange de bonnes pratiques entre régions, communautés et le gouvernement fédéral.
Lire notre position commune sur les conseils.
Une intersectionnalité qui peine à se matérialiser
Si toutes les contributions mentionnent l’intersectionnalité comme principe important, il n’est pas clair comment cela se concrétisera. Il serait intéressant d’inclure ce concept dans les indicateurs de réussite des actions, afin de retenir l’attention des instances qui les mettront en œuvre.
Deux absents: la lutte contre l’islamophobie et le racisme anti-migrant.e.s.
Les plans de la Fédération Wallonie-Bruxelles et de la Région bruxelloise et wallonne se focalisent sur les critères “dits raciaux”.
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Si cela semble logique de prime abord pour un plan de lutte contre le racisme, ce serait oublier que certaines formes de racisme se situent à la croisée des critères dits raciaux et de conviction religieuse: les musulman.e.s sont perçues comme musulman.e.s – et discriminé.e.s – à partir de leurs traits d’identités ethno-culturels (nom, nationalité, habits…)
Une mesure importante manquante à cet égard concerne la permission du port de signes convictionnels dans la fonction publique, pour les enseignant.e.s et les élèves.
Les spécificités du racisme vécu par les personnes migrantes ne semblent pas non plus prises en compte. Pensons notamment à leur criminalisation – dans le langage et le droit: double peine pour certain.e.s après un crime, sous la forme de la pêine + une possible déchéance de nationalité et/ou une déportation vers le pays dit “d’origine”, tandis que d’autres sont uniquement sanctionné.e.s pour le crime même.
Complémentarité des contributions
La Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), la Région bruxelloise (RBC) et la Région wallonne (RW) se sont manifestement concertées pour définir le contenu de leurs contributions respectives.
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Outre les conseils de lutte contre le racisme, nous notons (entre autres) les actions communes suivantes:
- Promouvoir l’approche intersectionnelle et transversale dans l’EVRAS (éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle) (RW et RBC)
- Des tests antidiscrimination sur le marché locatif et de l’emploi (RW et RBC)
- Favoriser la communication publique inclusive (RW, FWB et RBC).
- Faire connaître les points de signalements (RW, FWB et RBC).
Analyse de chaque contribution






